Entretien exclusif avec, ARISTIDES MEJIA CARRANZA, Vice-président de la République du Honduras en exil, à l’occasion d’une visite officielle en France
Aristides Mejia Carranza est vice-président de la République du Honduras en exil. Il est de passage en France pour rencontrer des membres du ministère français des Affaires étrangères et des responsables de l’Union européenne. Il a accordé un entretien exclusif à "La Marseillaise". Au Honduras, les manifestants pro-Zelaya continuent de manifester contre le président putschiste.
- Avez-vous pu entrer facilement sur le territoire français étant donné que le représentant d’Interpol au Honduras a demandé de vous faire arrêter, vous ainsi que d’autres ministres pour des faits de corruption ?
C’est exact, mais il n’a aucune légitimité. Au Honduras, Interpol est représenté par un policier aux ordres d’un pouvoir illégitime qui n’est pas reconnu. Les autorités françaises ont été averties de mon arrivée et vous voyez, je n’ai pas été arrêté. J’ai été reçu par le ministère des Affaires étrangères avec une escorte officielle.
- Quelles sont les dernières informations provenant du Honduras ?
La situation se dégrade de jour en jour. Chaque manifestation subit la répression et des arrestations. La Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH) rentre du Honduras où elle a recueilli des déclarations de victimes d’arrestations et d’agressions. Le danger c’est que plusieurs médias ont été fermés. Du coup, les gens ne savent pas à quel point leur pays est isolé, politiquement et économiquement.
La situation se dégrade de jour en jour. Chaque manifestation subit la répression et des arrestations. La Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH) rentre du Honduras où elle a recueilli des déclarations de victimes d’arrestations et d’agressions. Le danger c’est que plusieurs médias ont été fermés. Du coup, les gens ne savent pas à quel point leur pays est isolé, politiquement et économiquement.
Heureusement, les putschistes perdent certains de leurs soutiens. Depuis deux semaines par exemple, la classe moyenne descend aussi dans la rue alors qu’elle était restée silencieuse jusqu’à présent.
- Les Accords de San José, présentés par le médiateur Oscar Arias, président du Costa-Rica, sont-ils selon vous une base solide de dialogue ?
Pour nous, oui. Une délégation de l’Organisation des Etats Américains (OEA) est allée au Honduras pour rencontrer le Gouvernement putschiste et essayer de lui faire accepter ces accords. Nous verrons bien, même si je n’ai pas beaucoup d’espoirs. Le président Zelaya a estimé que ces accords assuraient une solution diplomatique. Mais le Gouvernement putschiste de Roberto Micheletti n’accepte pas la première condition : le retour au pouvoir sans condition de Manuel Zelaya.
Pour nous, oui. Une délégation de l’Organisation des Etats Américains (OEA) est allée au Honduras pour rencontrer le Gouvernement putschiste et essayer de lui faire accepter ces accords. Nous verrons bien, même si je n’ai pas beaucoup d’espoirs. Le président Zelaya a estimé que ces accords assuraient une solution diplomatique. Mais le Gouvernement putschiste de Roberto Micheletti n’accepte pas la première condition : le retour au pouvoir sans condition de Manuel Zelaya.
Quant à la question de l’amnistie, ils disent qu’ils demanderont aux différents pouvoirs de l’Etat (Congrès, Cour Suprême…) de statuer mais cela n’a aucune chance d’aboutir car ces organes ont eux aussi activement participé au putsch.
- Le 24 juillet, le président Manuel Zelaya a franchi la frontière avant de revenir au Nicaragua. Pourquoi ne tente-t-il pas une nouvelle incursion ?
Cette action a été réalisée dans le but de ne pas laisser tomber la résistance intérieure hondurienne. Mais deux dangers sont rapidement apparus : l’arrestation et l’assassinat. Nous avons décidé de poursuivre par la voie diplomatique mais nous sommes conscients que ces négociations s’épuiseront s’il n’y a pas de résultats positifs rapides.
- Le président Zelaya est-il en relation directe avec cette résistance intérieure ?
Tout à fait. Le président possède de nombreux soutiens au sein du Parti Libéral (le parti de Micheletti et de Zelaya, NdR) en plus de personnalités indépendantes, d’intellectuels, de syndicats ou de partis de gauche. Cette diversité a peut-être un projet de société qui comporte des différences, mais elle s’est réunie pour le rejet des putschistes, le retour de Manuel Zelaya au pouvoir et le rétablissement de la démocratie.
- Les élections présidentielles prévues le 29 novembre peuvent-elles finalement résoudre la crise ?
Il faut que le président Zelaya soit réinstallé pour que la transition se fasse dans de bonnes conditions (les élections doivent avoir lieu en novembre 2009 et l’installation du nouveau président en janvier 2010. Manuel Zelaya ne pourra pas se présenter car le mandat présidentiel n’est pas renouvelable, ndr). Or, dans ces conditions, les élections n’ont aucune légitimité. D’abord parce que le candidat du Parti Libéral Elvin Santos fait partie de ceux qui ont participé au coup d’Etat. Ensuite parce que des candidats comme celui de gauche César Ham ont déjà été agressés.
Les conditions d’une vraie démocratie ne sont pas réunies pour ces élections. Il faudrait que le futur gouvernement soit libre de rassembler le peuple après les élections sur la question de la réconciliation nationale. C’est impossible à imaginer aujourd’hui.
- Le 28 juin, tout est parti du refus de l’armée d’installer une quatrième urne lors d’élections. Cette urne visait à consulter le peuple sur des réformes éventuelles. Cette consultation est-t-elle toujours d’actualité ?
La quatrième urne a été rejetée par les putschistes parce qu’ils ne veulent pas changer de système politique alors que les manifestants disent que c’est nécessaire. Le processus n’est pas mort. Au contraire, il est encore plus d’actualité. Mais aujourd’hui, ce n’est pas le plus important. Le plus important c’est le rétablissement de la démocratie, des élections dans de bonnes conditions et le départ des putschistes.
- Le Honduras est un petit pays, mais l’affaire a pris une énorme ampleur en Amérique latine.
Ce n’est pas uniquement un problème hondurien. Le risque c’est que notre pays devienne un mauvais précédent. Si le coup d’Etat du Honduras persiste, certains groupes pourront envisager de faire de même dans leur pays, si leur président ne leur plait pas. C’est pour cela qu’il faut en finir avec ce régime putschiste.
Propos recueillis par SÉBASTIEN MADAU
Article publié le 27 août 2009 sur le quotidien la Marseillaise sud-est
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