Et si les putschistes temporisaient pour se retrouver seuls lors du scrutin présidentiel du 29 novembre ? Décryptage
La situation au Honduras est toujours bloquée, plus d’un mois après le coup d’Etat. Même si le Gouvernement putschiste de Roberto Micheletti est isolé par la communauté internationale, chaque jour qui passe est un jour perdu pour le camp Zelaya dont les principaux membres sont à l’étranger.
En effet, face à un Gouvernement qui refuse le dialogue, une armée qui réprime, difficile de parier sur un rapide retour au calme.
Un putsch « légitimé » par les urnes ?
Au final, on a l’impression que les putschistes vont faire le dos rond jusqu’aux élections présidentielles du 29 novembre dans le but de les remporter et ainsi « légitimer » leur action. Le clan Micheletti n’hésitera pas à temporiser. Carlos Lopez, ministre des affaires étrangères du gouvernement putschiste a estimé en début de semaine qu' « une fois que la campagne aura débuté, l'obsession pour M. Zelaya commencera à s'estomper ». Et d'assurer que « bien sûr l'élection présidentielle sera reconnue ».
Paradoxalement, les auteurs du coup d’Etat auraient tout à gagner de bloquer le pays. En refusant le retour de Manuel Zelaya, ils empêcheraient à l’opposition au coup d’Etat (la Gauche et les partisans de Zelaya en général) de mener campagne.
Du coup, on se retrouve aujourd’hui avec trois partis en campagne : le Parti libéral (de Zelaya et Micheletti !), le Parti Démocrate-chrétien et le Parti National. Quant à l’Unification Démocratique (communiste et anticapitaliste), elle a été la seule formation à soutenir Zelaya et condamner le coup d’Etat. Malheureusement, ce parti est plus préoccupé à empêcher l’arrestation de ses membres et de ses élus que de mener campagne.
Les élections risqueraient donc de se jouer entre des formations soutenant le coup d’Etat. Après s’être débarrassé de Manuel Zelaya, il ne leur resterait plus qu’à se partager les pouvoirs.
Une inconnue demeure pourtant : l’attitude du Parti libéral. Les deux ennemis Zelaya et Michelleti en sont membres. Roberto Michelletti en a pris le commandement en purgeant l’organigramme. Le parti a désigné son candidat : Elvin Ernesto Santos. Les putschistes soutiennent ce jeune, issu d’une autre génération et qui refuse de condamner le coup d’Etat.
La base du Parti libéral peut tout faire basculer
Reste que Manuel Zelaya possède de nombreux soutiens dans la base du Parti et parmi les élus. Des assemblées générales de base ont condamné le coup d’Etat, demandé le retour de Zelaya et exigé l’exclusion de Micheletti et d’Elvin Santos. Ils ont appelé à lutter au sein du Front National contre le coup d’Etat.
Selon la Constitution, Manuel Zelaya n'a pas le droit de briguer un second mandat qui court jusqu’au 27 janvier 2010. Mais on peut estimer que si lui et ses partisans se voyaient accordé le droit de rentrer au Honduras, ils seraient capables de mener une campagne de fond. On peut également penser que Patricia Rodas, ancienne présidente du Parti Libéral (avant d’être évincée par le putsch) actuelle ministre des affaires étrangères, très présente aux côtés de Manuel Zelaya, pourrait jouer un grand rôle dans cette bataille.
SÉBASTIEN MADAU
Article publié le 31 juillet 2009 sur le quotidien la Marseillaise sud-est
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