Manuel Zelaya est attendu à la frontière par ses partisans et lance un message aux forces armées
Comme il l’avait annoncé, le président Manuel Zelaya a entamé une marche qui l’emmène jusqu’à la frontière entre le Nicaragua et le Honduras duquel il a été expulsé par l’armée le 28 juin dernier. Manuel Zelaya a prévu de passer la frontière aujourd’hui ou demain « car nous allons lentement pour pouvoir arriver avec un fort contingent d’Honduriens qui nous accompagnent » a-t-il déclaré à une chaîne câblée argentine (TN).
Le Gouvernement putschiste maintient sa position et promet de l’arrêter au cas où celui-ci rentrerait dans son pays. Le couvre-feu a été décrété dans les villes limitrophes.
Au Honduras, des dizaines de milliers de personnes soutenant le président Zelaya continuent d’affluer depuis plusieurs heures de l’autre côté de la frontière pour lui permettre de rentrer. La grève générale est effective depuis jeudi. Trois syndicats ouvriers sont notamment dans l’action : les confédérations Unitaire des travailleurs (FUTH), des Travailleurs du Honduras (CTH) et Centrale Générale des Travailleurs (CGT). Juan Barahona, président de la FUTH a assuré que les syndicats du secteur public ont « prévu la prise des institutions et d’autres actions, qui seront accompagnées par le peuple dans la rue ».
Ils ont bien évidemment rencontré la police et l’armée postées aux postes de douanes, ainsi que sur les routes. Il serait très surprenant que des heurts n’interviennent pas dans les prochaines heures.
Le président élu a indiqué retourner vers son pays « avec prudence, sans armes, je suis un homme pacifiste. J’ai tout le droit de revoir ma maison, ma famille et accomplir le mandat que m’a confié le peuple dans les urnes ». Et d’appeler l’armée à baisser les armes en la désignant comme responsable de quelque attentat à sa vie. « Je n’ai pas peur mais je sais qu’il y a un risque qu’à mon arrivée ils me tirent dessus. Ils m’ont dit de ne pas le faire parce qu’eux sont disposés à le faire » a-t-il avoué. Aussi, avant d’entamer sa marche, il a intimé les soldats de se raviser. « Je demande aux soldats de ne pas se tacher de sang et qu'à la frontière, nous puissions aboutir à un accord national pour restituer la paix et la démocratie » en estimant que les Forces Armées devaient se « soumettre à l’autorité choisie par le peuple ».
On se dirige à grand pas vers une solution violente à la crise. L’OEA et les Etats-Unis, qui soutiennent officiellement Manuel Zelaya, lui ont déconseillé toutefois de tenter son retour pour le moment.
Quant au président bolivien Evo Morales, il a soulevé un point important. « Je pense que cela peut déboucher sur une lutte armée » a-t-il déclaré. « J’ai très peur. Et la droite, les oligarques honduriens et les militaires doivent avoir une profonde réflexion sur ce qui adviendra ensuite ». D’après lui, la seule solution demeure le retrait des putschistes. Il a en outre souligné que si « l’Empire » à savoir les Etats-Unis, le voulait, le président Zelaya pourrait retourner au Honduras sous la protection des « plus de mille soldats américains postés dans la base américaine présente au Honduras ».
Les Accords de San José, présentés mercredi par le médiateur Oscar Arias, et refusé par les putschistes, semblent décidément bien loin.
Les droits de l’homme en question
Une mission internationale créée le 17 juin pour vérifier le respect des Droits de l’Homme depuis le coup d’Etat a relevé « l’existence de graves violations (…) survenues dans le pays après le coup d’Etat ». Les différents couvre-feux ont également été montrés du doigt, tout comme des relents de xénophobie. Les étrangers et notamment les Nicaraguayens « se sont vus affectés de manière disproportionnée à travers des détentions arbitraires et irrégulières ». Le rapport dénonce également « les menaces » envers les travailleurs « pour garantir une présence obligatoire à des défilés convoqués par le régime de fait et le secteur privé ».
Au niveau des médias, se sont produites « de graves restrictions à la liberté d’expression après le coup d’Etat ». « Nous avons constaté l’assaut de plusieurs locaux de médias, des menaces de mort contre des journalistes, le blocage de leurs transmissions ou les écoutes téléphoniques et le blocage des accès internet ». En revanche, les membres de la mission affirment que certains moyens de communication honduriens « ont eu une attitude irrespectueuse avec la pluralité des idées et la démocratie » étant donné qu’« ont été entendues plusieurs prises de position ouvertement répressives et incitant à la violence contre les partisans du Gouvernement déchu ».
La mission a conclu son rapport en demandant à la communauté internationale de défendre la réintégration de Manuel Zelaya et de ne pas reconnaître le gouvernement de Roberto Micheletti.
SÉBASTIEN MADAU
Article publié le 25 juillet 2009 sur le quotidien la Marseillaise sud-est
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