vendredi 27 novembre 2009

UN NOUVEAU COMBAT POUR LA DÉMOCRATIE

Le président Zelaya est rentré par surprise dans son pays

Après 86 jours d’exil, le président Manuel Zelaya a réapparu par surprise lundi dans l’enceinte de l’ambassade du Brésil. Après quelques hésitations, la nouvelle a bien été confirmée.

86 jours que les partisans de « Mel » attendaient ce moment. Eux qui chaque jour, ont du braver la répression de la police et de l’armée. Certains y ont même laissé leur vie.

Malgré le black-out médiatique sur place et les démentis, la nouvelle du retour du président a incité des milliers de honduriens à sortir et à se rendre autour du bâtiment de l’ambassade afin de le « protéger ». De sont côté, Manuel Zelaya est sorti quelques instants sur le toit de l’ambassade à Tegucigalpa où il a brandi un drapeau bleu et blanc du Honduras. « Je suis ici à Tegucigalpa. Je suis ici pour le rétablissement de la démocratie, pour lancer un appel au dialogue » a-t-il affirmé.

Des appels à apporter de la nourriture et de l’eau aux manifestants ont été lancés sur les radios alternatives qui ont réalisé durant tout le coup d’État un énorme travail d’information. Face à ce regain de mobilisation, le « président » putschiste Roberto Micheletti à demandé au président Lula de lui remettre « Manuel Zelaya afin qu’il puisse répondre de ses actes » après avoir estimé qu’il avait été démis de ses fonctions le 28 juin dernier « dans la légalité ». Juste après avoir décrété le couvre-feu, non respecté par les partisans de Zelaya, Roberto Micheletti a appelé la police et l’armée à se tenir prêtes en affirmant que « l’ex président était revenu au Honduras pour perturber les élections » présidentielles du 29 novembre prochain.

À ce propos, excepté la Gauche qui a elle-même subi la répression, tous les candidats déclarés à l’élection présidentielle n’ont abordé, et donc condamné, à aucun moment le coup d’État durant leur campagne électorale.

La troisième tentative a été la bonne

Manuel Zelaya avait été expulsé par l’armée le 28 juin dernier. Les putschistes lui reprochaient de vouloir organiser des consultations populaires visant à réformer l’appareil d’État hondurien. Il avait tenté à deux reprises de rentrer au Honduras, une fois par avion, une fois à pieds. En vain. À ce jour, on ne connaît pas précisément les conditions du retour de Manuel Zelaya dans son pays. Il semblerait qu’il soit arrivé au Salvador, où il se trouvait ce week-end. L’entourage du président parle d’un voyage à travers les montagnes et les traversées de rivières escorté seulement par quatre personnes. Après 86 jours de lutte et de manifestations, qui vont encore durer, les opposants au putsch demandent désormais la réunion d’une Assemblée constituante, confortés par la présence de « Mel ».

À présent, la tension risque de régner dans les rues du Honduras. Déjà isolés, sans visas pou quitter le pays, on se demande bien quelle voie vont choisir Roberto Micheletti et les instigateurs du coup d’État. La négociation de leur part semble la plus raisonnable. Car si Micheletti bénéficie de soutiens à droite et dans les milieux économiques, le président Zelaya a l’avantage d’avoir ses partisans dans la rue. Un réel rapport de force est en train de se créer.

GRANDE VIGILANCE

La nouvelle du retour de Manuel Zelaya Rosales, président du Honduras depuis 2006, a ravi tous les opposants au coup d’État qui frappait ce petit pays d’Amérique centrale depuis le 28 juin. Durant 86 jours, la résistance n’a cessé de lutter pour le retour de « Mel », le président constitutionnel. Beaucoup étaient des partisans du président, tous étaient des défenseurs de la démocratie.

En effet, l’expulsion du président élu a mobilisé plusieurs couches de la société hondurienne, qui n’avaient pas forcément l’habitude de revendiquer côte à côte, autour d’une vision de la société basée sur la démocratie et la participation citoyenne. Le désir de voir convoquée une Assemblée constituante a fait du chemin.

L’erreur des putschistes aura été de condamner Zelaya dès ses premières intentions, entraînant de fait le réveil des masses. Deux jours après le retour de Zelaya, rien n’est encore joué, ni gagné. On risque d’assister à de nombreux affrontements physiques et diplomatiques entre les deux camps. Mais un échec du coup d’État amoindrirait naturellement les velléités des groupes de la droite extrême séduits par l’exemple hondurien et qui auraient souhaité le reproduire dans d’autres pays d’Amérique latine dirigés par des gouvernements progressistes. Car c’est bien de ça dont il s’agit. En voulant renverser le pouvoir légitime, les putschistes ont voulu renverser en fait tout un élan émancipateur et un nouveau mode de développement. Pour l’heure, le déclic n’a pas eu lieu, mais la vigilance reste de mise.

SÉBASTIEN MADAU


Article publié le 23 septembre 2009 sur le quotidien la Marseillaise sud est

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